Question : Assalamu alaykum wa rahmatullah,
J’aimerais comprendre la réelle portée de l’apprentissage de la science religieuse en français, via des étudiants en science. Est-ce que cela permet d’acquérir une vraie compréhension du dîn, de faire la da’wah, de corriger les situations autour de soi, et de vraiment s’améliorer dans sa pratique ? Ou bien est-ce que cela reste un apprentissage de base, utile uniquement pour pratiquer correctement mais avec des limites importantes dans la compréhension profonde des sujets ?
En comparaison, qu’apporte de plus l’apprentissage directement en arabe auprès des savants ? Qu’est-ce que l’on ne peut pas atteindre tant qu’on reste uniquement sur des cours en français, même si on y consacre du temps et qu’on les suit sérieusement ?
BarakAllahu fikum pour votre éclairage.
Réponse
Oustadha : Il y a beaucoup de sœurs qui connaissent, on va dire, leur religion en français, elles savent ce qui est halal et haram, ce qui est bien ou pas bien, mais elles seraient incapables de le faire en arabe. Elles ne connaissent les choses qu’à travers les traductions.
L’interlocutrice : Donc, est-ce que l’on peut dire que quelqu’un qui a des connaissances en français a du ilm (de la science) ?
Oustadha : Non, ce n’est pas de la connaissance. La science n’est pas la connaissance. Il faut avoir de la science, il faut l’avoir étudiée.
L’interlocutrice : Quelle est la différence entre celui qui connaît des hadiths, le Coran et des fatwas en arabe, et celle qui connaît la même chose en français ? Ils n’ont pas le même niveau ?
Oustadha : Non, ce n’est pas un problème, c’est pareil, car même une personne qui connaît des hadiths et des fatwas en arabe n’est pas forcément un talib al-‘ilm (un étudiant en science) si elle n’a pas étudié la science formellement.
L’interlocutrice : D’accord. Donc, celle qui connaît les fatwas en français, c’est la même chose, elle n’a pas encore étudié la science.
Oustadha : D’accord, c’est-à-dire qu’ils n’ont pas l’autorisation de faire la da’wah (prêche). Parce qu’ils n’ont pas le matériel pour faire la da’wah. Les savants n’autorisent pas quelqu’un à faire la da’wah, sauf si un savant lui-même l’a autorisé. Pour quelqu’un qui veut faire la da’wah, il doit avoir un savant qui va l’y autoriser. Même si tu connais le halal et le haram, tu ne peux pas dire « demain, je vais faire une halqa ou une assise pour la science« . C’est très grave, parce que c’est une religion. Qu’est-ce qu’il va dire aux gens ?
C’est pour ça qu’on dit que même si tu connais le halal et le haram, que ce soit en France ou en Europe, ce n’est pas permis de faire la da’wah. Tu peux corriger ta famille, par exemple. Si tu connais la prière telle que le Prophète (Sallallahu Alayhi Wa Sallam) la faisait, tu peux corriger un membre de ta famille. Mais pour faire une assise et une da’wah, je ne peux pas.
L’interlocutrice : Oui, en fait, il y a une différence entre faire le rappel aux proches (nos parents, nos frères, nos maris, nos enfants) et se prétendre avoir de la science pour aller enseigner aux autres.
Oustadha : L’enseignement de la science n’est pas donné à tout le monde. Bien sûr. C’est-à-dire que si quelqu’un dit « moi, je connais le haram, je vais donner de la science« , on va lui répondre que c’est interdit, c’est haram. C’est pour ça que tous les talib al-‘ilm qui ont de la science ne peuvent pas faire la da’wah, sauf s’il y a une autorisation des grands savants. Avant, les grands savants disaient qu’ils ne pouvaient pas faire la da’wah sauf si les compagnons les y autorisaient. C’est ça.
L’interlocutrice : Et du coup, est-ce qu’il y a une différence si on met deux personnes, deux sœurs ? Elles ont les mêmes connaissances, sauf qu’une les a en arabe et l’autre en français. Est-ce que les deux sont considérées comme égales ?
Oustadha : Oui. Si elle comprend bien le français traduit et l’autre comprend bien, c’est égal. Mais si la sœur en français comprend bien, elle ne comprend pas très bien l’arabe, elle va dire que l’arabe est mieux que le français. Mais je dis toujours, même si je suis en études en français via des étudiants, c’est mieux d’apprendre l’arabe.
L’interlocutrice : Oui, c’est une obligation d’apprendre la langue arabe pour mieux comprendre le Coran. Et à partir de quand peut-on être considéré comme étudiant en science ? C’est-à-dire, comment peut-on avoir le nom de talib al-‘ilm ? Est-ce que quelqu’un qui prend des cours plusieurs fois par semaine…
Oustadha : J’ai lu des fatwas qui disent qu’on ne peut pas être un talib al-‘ilm… Je dis qu’on est un talib al-‘ilm quand un savant nous autorise.
L’interlocutrice : Toi, tu veux dire dans le sens de prêcher, de faire la da’wah.
Oustadha : Mais celui qui ne veut pas prêcher, quelqu’un qui apprend sa religion, il est considéré comme un talib al-‘ilm. Mais pour faire la da’wah, il faut…
L’interlocutrice : Mais il n’a pas le statut de prêcheur, de prédicateur.
Oustadha : Il y a une différence. Oui, il y a une différence. Mais quelqu’un qui a fait la prédication, on l’appelle talib al-‘ilm. Oui, voilà. Ça s’appelle talib al-‘ilm. D’accord. Mais ça ne veut pas dire qu’il peut faire la da’wah et… et chez les autres. Oui. Il y a des divergences là-dessus…
L’interlocutrice : Je connais ton avis sur ça, c’est pour ça que je te dis ça, mais c’est vrai qu’il y a des frères sur Instagram, des étudiants à Médine qui sont diplômés, qui ont trouvé des fatwas de savants qui disent que la tazkiyah (recommandation/autorisation) n’est pas obligatoire. Par rapport au hadith qui disait que si vous connaissez une science, il faut la… Si moi, par exemple, je connais ça, c’est mon devoir de la…
Oustadha : Oui, mais tu connais quelque chose, il y a une explication de ça. Oui, oui, il faut la comprendre.
L’interlocutrice : Moi, je suis 100% d’accord avec toi. Il y a des sœurs qui posent la question parce que c’est vrai que certains prédicateurs vont parler du fait qu’on peut prêcher du moment où on connaît quelque chose. Pour eux, il n’y a pas…
Oustadha : On peut le prêcher, mais il faut le comprendre. Il faut savoir que dans les sabab (raisons)… Un sabab… Parce qu’en Na’im, comment ils ont pris le compagnon Na’im ? Par les assises du Na’im. C’est ça, Na’im, franchement. Ça veut dire qu’ils ont compris. Il faut apprendre et comprendre. Après, tu vois…
L’interlocutrice : Moi, je suis 100% d’accord avec toi. Je ne prends que de personnes que je vais savoir que tel savant les a recommandées, etc. Parce qu’aujourd’hui, il y a tout et n’importe quoi sur Internet.
Oustadha : Oui, ça… Instagram. Voilà, Instagram. Il y a même des frères et des sœurs qui prennent juste leur téléphone et ils vont parler parce qu’ils ont envie de parler. On pourrait tous le faire, finalement. Ils parlent pour parler, franchement. Ce n’est pas vraiment pour la peine. Parce que ta peine, c’est ça. Ce n’est pas de dire, tu apprends un hadith ou deux hadith, tu vas dire, je suis talib al-‘ilm, non.
L’interlocutrice : Dans ces cas-là, on partage les paroles des savants.
Oustadha : Oui, c’est ça. On partage une vidéo de Cheikh Al-Fawzan, une vidéo de Cheikh Ruhayli. Je ne peux pas donner de précision pour les sœurs. Tant que tu n’es pas autorisée par un alim, tu ne peux pas te fier à ta seule lecture d’un hadith pour en donner l’explication. Si on me demandait d’expliquer un hadith, je bloquerais. C’est pour cela qu’il faut être prudent.
L’interlocutrice : Oui, bien sûr.
Oustadha : Mes sœurs, faites bien attention, même sur les réseaux sociaux comme Instagram et Facebook. Il y a beaucoup de personnes qui ne font que parler et que l’on appelle à tort des talib al-‘ilm. Leurs histoires sont souvent fausses.
L’interlocutrice : Oui. Que Dieu nous guide. Nous devons essayer d’écouter les grands savants, comme Cheikh Fawzan, car il y a largement de quoi faire aujourd’hui, avec les vidéos traduites en français, sans avoir besoin de prédicateurs non qualifiés.
Oustadha : Je vais vous donner un exemple : une sœur écoute un cours de Cheikh Fawzan et décide le lendemain de faire sa propre assise. Ce n’est absolument pas autorisé. Même si vous pensez avoir compris, imaginez que l’on vous pose une question. Une fois, une sœur a commis beaucoup d’erreurs en donnant un avis sur une personne décédée, car elle n’avait consulté aucun savant. Son avis n’était pas fiable.