Question : J’aimerais savoir si le téléphone est considéré comme un bien appartenant à la femme et si l’homme a une autorité dessus, c’est-à-dire s’il peut le lui retirer comme bon lui semble. Est-ce que le mari peut prendre le téléphone de sa femme, comme on confisque un objet à un enfant ? Peut-il faire la même chose avec sa femme, c’est-à-dire le prendre sans lui demander la permission ? C’est justement ce que la sœur demande : est-ce que le téléphone appartient à la femme ? On peut même rajouter la question suivante : et si c’est lui qui l’a acheté, ou au contraire, si ce n’est pas lui ? Par exemple, moi, si j’ai un téléphone portable que j’ai acheté moi-même avec mon propre argent, ou bien, au contraire, si j’ai un téléphone que mon mari m’a offert, parce que c’est lui qui prend en charge mes besoins, est-ce que, dans un cas comme dans l’autre, ce bien lui appartient à lui, et donc, est-ce qu’il peut me l’enlever quand il veut ?
Réponse
Oustadha : Non, tant qu’il t’a donné cet objet comme un cadeau, il ne peut pas le reprendre. Ce n’est pas permis. Même dans le cas d’un cadeau, une fois qu’il est offert, il ne t’appartient plus.
L’interlocutrice : Oui, ça devient la propriété de la personne à qui on l’a offert, même si c’est lui qui l’a acheté.
Oustadha : Exactement. Dès lors que tu offres quelque chose à quelqu’un, cela devient sa propriété. Même si c’est toi qui l’as payé. Comme un cadeau que tu offres à ta fille ou à ta cousine : ce n’est pas permis de le reprendre. On n’a pas le droit de le reprendre devant les gens. C’est une question de respect.
L’interlocutrice : Oui, je comprends. C’est comme un chien qui vomit, puis revient à son vomi. C’est une mauvaise image, mais c’est pour dire que reprendre un cadeau est très mal vu. Même si c’est toi qui l’as donné, ça ne t’appartient plus. Mais est-ce qu’il a quand même le droit de regarder dedans ?
Oustadha : Il peut interdire l’usage. Par exemple, il peut punir en retirant l’objet, comme un téléphone.
L’interlocutrice : Par exemple, si j’ai fait une bêtise, que je suis trop sur mon téléphone, et qu’il me dit : « Oum Yahya, ce soir je te prends le téléphone. In chaa Allah je te le rends dans deux jours. » Est-ce qu’il en a le droit ?
Oustadha : Oui. Il peut le faire dans le cadre d’une punition justifiée.
Si tu n’as pas rempli ses droits à cause de l’usage du téléphone, il peut décider de te le retirer temporairement.
L’interlocutrice : Oui, donc si c’est à cause d’un manquement, il peut me punir de cette façon.
Oustadha : Tout à fait. Il en a le droit, car tu n’as pas accompli tes devoirs envers lui.
Interlocutrice : Voilà. Parce qu’on n’a pas fait à manger, on n’a pas fait le ménage…
Oustadha : On n’a pas fait le ménage. Ça veut dire qu’on n’a pas été propre. C’est-à-dire que tu n’as pas bien pris soin de la maison. Tu n’as pas rangé, tu n’as pas fait ce qu’il fallait. Et donc, lui, il considère que, puisque les choses nécessaires n’ont pas été faites — comme bien s’habiller, bien manger, bien entretenir la maison — il a le droit de te punir. Il peut le faire si cela a un bénéfice. Mais sinon, ça ne sert à rien. C’est une punition inutile.
Interlocutrice : Mais s’il est juste… pas gentil. Enfin… pas méchant non plus, mais tu sais, certains hommes parfois, ils sont…
Oustadha : Voilà, ça devient un résultat, en fait. Parce que si, par exemple, il me punit deux jours, moi, je vais faire pire qu’avant. Donc ça n’a aucun effet positif. Il faut que la punition — ou la privation, je ne sais pas si c’est bien français — soit bénéfique, qu’elle ait un sens.
Interlocutrice : Oui, bénéfique.
Oustadha : Sinon, ça ne sert à rien. Il y en a, franchement… je ne vise personne, attention, mais il y a des maris qui sont juste méchants. La femme, elle a tout bien fait : la maison est propre, les enfants sont bien, tout est bien.
Mais lui, il décide, ce soir-là, qu’elle ne doit pas parler avec ses copines. Juste comme ça. Et il lui enlève le téléphone. Parfois, ce sont des comportements de pervers narcissiques. Ils agissent comme ça pour dominer. Et ce n’est pas correct.
C’est vrai que le mari a des droits sur son épouse. S’il a besoin d’elle, s’il veut lui parler de quelque chose d’important, elle doit poser son téléphone et être attentive, bien sûr. Mais si elle abuse du téléphone, si elle exagère, là aussi ce n’est pas permis. Ce n’est pas son droit d’abuser. Donc dans ce cas, on doit trouver le juste milieu.
L’interlocutrice : Oui, juste au milieu. Que ce soit par la femme ou par l’homme. Moi, je comprends la première situation, c’est-à-dire : la femme est trop sur son téléphone, elle ne fait rien à la maison. Dans ce cas, c’est comme une nasiha, c’est comme un conseil.
Oustadha : C’est un conseil en action.
L’interlocutrice : Voilà, c’est peut-être une manière pour qu’elle prenne conscience, qu’elle se dise : « C’est vrai, je suis trop sur le téléphone. » C’est un message pour elle. Ce n’est pas qu’il fait ça pour être méchant. Mais il y en a d’autres, eux, ils veulent juste embêter la femme. Parce que, je ne sais pas… si la femme a bien cuisiné, a tout fait correctement, a accompli les droits de son mari, alors dans ce cas, il n’a pas le droit de lui retirer le téléphone.
Oustadha : Oui, oui. Ce n’est pas juste. Ce n’est pas juste.
L’interlocutrice : Mais à propos de ce que vous disiez… Il peut regarder dans le téléphone, mais, par exemple, moi je parle avec mes copines, je n’ai pas envie que mon mari lise ce qu’on se dit…
Oustadha : Oui. Ce que j’ai dit, ça ne concerne pas une conversation entre femmes.
L’interlocutrice : D’accord. Donc, il peut utiliser le téléphone pour passer un appel, par exemple…
Oustadha : Voilà. Mais il ne rentre pas dans l’intimité.
L’interlocutrice : Oui. D’accord.